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mardi, 25 avril 2023
Journal de bord de notre cerveau à tous les niveaux : quelques techniques d’enregistrement de l’activité nerveuse en temps réel

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Étant toujours dans la phase de relecture finale de mon livre jusqu’à la fin du printemps, je continue son « journal de bord » en y publiant certains encadrés qui n’ont pu, faute d’espace, trouver leur place dans le bouquin. Celui-ci entretenant déjà des rapports étroits avec le site web Le cerveau à tous les niveaux et son blogue grâce à différents renvois, cette conversion ne fait donc qu’étendre une approche déjà présente depuis le début du projet. Je poursuis donc aujourd’hui mon « nettoyage » du chapitre 6 en présentant le fonctionnement de quelques techniques d’enregistrement de l’activité nerveuse en temps réel, un peu comme je l’avais fait pour les techniques d’imagerie cérébrale qui, elles, ont une meilleure résolution spatiale mais une moins bonne résolution temporelle.

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Comme les neurones sont petits, extrêmement nombreux et qu’il y a différents types d’activité électrique sur les dendrites, le corps cellulaire et l’axone, interpréter ce qu’on enregistre dans le cerveau pose des défis énormes. On peut descendre une électrode dans le milieu extracellulaire entre les neurones et capter ainsi la somme des activités électriques générées par différents phénomènes électrochimiques dans de nombreux neurones autour de sa pointe.

Ce signal est appelé en anglais les « local field potentials », ou LFP. En comparant cette activité à un point de référence, ses variations peuvent être mesurées en millivolts. Typiquement, on enregistrera alors quelques milliers de neurones dans un rayon de 100 à 300 μm, parfois jusqu’à 1 millimètre, ça reste débattu. On peut alors filtrer ce signal global pour isoler des phénomènes oscillatoires dans des fenêtres de fréquences bien précises. Par exemple, ce qu’on capte dans les plus hautes fréquences du signal, de 600 à 3 000 Hz, correspond à la superposition des potentiels d’action émis par ces quelques milliers de neurones. Autour de 250 Hz, on filtre alors pour les LFP. Quant aux fréquences plus basses que 200 Hz, elles seraient un reflet des inputs arrivant sur les dendrites des neurones avoisinants la pointe de l’électrode dans un rayon plus large.

On arrive ensuite à l’échelle de l’électrocorticogramme, c’est-à-dire l’application d’électrode plus grosse directement sur la surface du cortex. Il faut donc ici aussi avoir ouvert le crâne, ce qui en fait une technique invasive peu utilisée chez l’humain sauf dans des cas où les patients sont en attente d’une chirurgie cérébrale pour l’ablation d’une tumeur ou d’un foyer épileptique, où l’ouverture du crâne sera de toute façon nécessaire. On capterait alors l’activité d’encore plus de neurones dans un rayon d’environ 3 millimètres autour de l’électrode. Le niveau suivant est celui de l’électroencéphalogramme, ou EEG, qui permet d’enregistrer l’activité électrique globale du cerveau en accolant des petites électrodes sur le cuir chevelu.

Cette technique non invasive a été mise au point dès le milieu des années 1920 par l’allemand Hans Berger. S’il a pu enregistrer de si faibles courants à travers les méninges, le crâne et le cuir chevelu, c’est parce que les dendrites apicaux des neurones pyramidaux du cortex pointent tous vers la surface et que l’activité synchrone qui s’y déroule simultanément est juste suffisamment forte pour qu’on puisse la détecter à la surface du crâne en l’amplifiant beaucoup. Contrairement à d’autres techniques d’imagerie cérébrale globale comme le PET scan ou la résonance magnétique fonctionnelle, l’EEG est une mesure directe de l’activité électrique neuronale avec une résolution temporelle de l’ordre de la milliseconde. Par contre, comme le voltage diminue avec le carré de la distance, l’activité dans les structures sous-corticales est plus difficile à détecter avec l’EEG et la résolution spatiale n’est pas sa force. C’est plutôt la possibilité de capter avec une grande précision le moment où surviennent certains événements dans le cerveau. Pour faire une analogie avec les gens là-bas dans les estrades qui regardent le match de baseball, on est bien incapable de discerner qui parle à qui en ce moment, mais si un coup de circuit est frappé, on entendra à cet instant précis les cris de joie de la foule.

Un peu de la même façon, à partir des années 1970, on s’est mis à enregistrer l’EEG durant la présentation de toutes sortes de stimuli au sujet. Ça déclenche sur le tracé de l’EEG ce qu’on appelle des potentiels évoqués. Par exemple, lorsque le dernier mot d’une phrase est anormal, l’EEG montre une déflexion négative environ 400 millisecondes après que le sujet finit de lire la phrase.

Finalement, alors que l’EEG enregistre  l’activité électrique du cerveau, la magnétoencéphalographie, ou MEG, mesure le champ magnétique  associé à ce courant électrique grâce à des détecteurs sensibles aux champs magnétiques alignés autour de la tête. La MEG est la plus sûre des diverses technologies d’imagerie cérébrale parce que la machine n’envoie rien dans le cerveau et ne touche même pas la tête.

L’espèce de gros séchoir à cheveux sous lequel on met notre tête contient de l’hélium liquide à -260°C qui refroidit des magnétomètres à base de supraconducteurs qui deviennent alors extrêmement sensibles aux faibles champs magnétiques produits par nos neurones lorsque refroidis à de telles températures. L’avantage de mesurer ces champs magnétiques, même s’ils sont très faibles, c’est qu’ils passent à travers le crâne et autres tissus sans aucune distorsion, contrairement à l’EEG dont le signal est plus brouillé. Le taux d’échantillonnage temporel de la MEG est comparable à celui de l’EEG aux alentours de 1000 échantillons par seconde et possède une résolution spatiale assez fine de l’ordre de quelques millimètres. Et la technique ne cesse de se raffiner

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