mardi, 24 octobre 2017
Quand la politique influence notre environnement, et donc notre corps et notre cerveau
Comme je l’ai présenté ici le 11 septembre dernier, voici le résumé d’un aspect de mon cours #6 de l’université du troisième âge (UTA) que je donnerai demain à Longueuil et lundi prochain à St-Bruno.
L’orientation un peu inhabituelle du billet d’aujourd’hui m’a été inspirée par les élections municipales qui se déroulent actuellement au Québec et plus particulièrement dans ma ville, Montréal (désolé pour nos ami.es ailleurs dans la francophonie, mais vous pourrez sans doute faire les transpositions qui s’imposent à votre ville…).
Quel est le rapport avec ce cours sur les liens intimes entre le cerveau, le corps et l’environnement ? Tout simplement les effets considérables que peut avoir l’environnement sur le corps et le corps sur le cerveau en termes de santé de ces derniers. Et comme les choix politiques influencent notre environnement, le politique peut influencer notre santé physique et mentale pas mal plus qu’on pourrait le croire. Et en particulier ici en ce qui concerne le choix d’une administration politique municipale, un niveau qui touche de près nos vies quotidiennes.
On pourrait épiloguer longuement sur ce que je m’apprête à faire ici (intégrer science et politique) et ça nous ferait vite remonter à des discussions philosophiques sur le type d’éthique qu’on met de l’avant (et je suis, vous le découvrirez assez vite, un conséquentialiste crasse à ce niveau !). Car vient un temps où l’on ne peut plus dissocier ce qu’on sait, qu’on lit quotidiennement depuis des décennies, qu’on enseigne, de ce qui se passe dans son milieu de vie entre ses concitoyen.nes que l’on croise à l’épicerie ou au parc d’à côté, et pas seulement par l’intermédiaire de ses écrits sur Internet.
Et l’une de ces chose où la science a accumulé énormément de données est ce qui fait du bien au cerveau et au corps d’un être humain et ce qui, dans son environnement, est néfaste pour sa santé.
Je l’ai écrit ici à maintes reprises et il se passe rarement une semaine sans qu’une étude ne sortent à ce sujet : une bonne hygiène de vie non seulement augmente l’espérance de cette vie en santé, mais ralentit les pertes cognitives liées au vieillissement normal ou associées à des troubles dégénératifs du cerveau comme l’Alzheimer.
Et l’on peut ramener ces « conseils santé » en 6 points :
1) diète équilibrée, faible en gras saturés et riche en fruits, légumes, noix, céréales, poisson, huile d’olive, etc…
2) activité physique, non seulement bénéfique pour le système cardiovasculaire, mais aussi pour les fonctions cognitives et le moral
3) activités intellectuelles stimulantes (travail, passion, loisirs…)
4) activités sociales et implication dans la communauté
5) l’importance d’un bon sommeil
6) absence de stress chronique (inhibition de l’action)
Or beaucoup de décisions concernant l’organisation de proximité de notre environnement qui ont des impacts directs sur ces six points sont prises au niveau municipal.
Ce qui nous ramène aux élections du 5 novembre prochain à Montréal. Car je dirais que cette élection est unique en son genre. Je n’ai pas de souvenirs d’un choix aussi facile à faire pour quiconque a le moindrement à cœur la santé et le bien-être de ses voisin.es.
Ce n’est en effet pas tous les jours qu’on a l’occasion de remplacer un politicien autoritaire « professionnel » dont l’ancien parti au niveau fédéral fut celui du tristement célèbre « scandale des commandites » (Denis Coderre) par une jeune femme progressiste au passé de militante contre les inégalités sociales (Valérie Plante) appuyée par un parti démocratique comme Projet Montréal.
D’autant plus que la dernière semaine donne à penser que Valérie Plante a de réelles chances de l’emporter. Et comme ce sont deux extrêmes qui s’affrontent, les changements concrets dans la qualité de vie pourraient bien se traduire très rapidement si Valérie Plante l’emporte, notamment en termes de vies sauvées et d’années de vies gagnées à partir du moment où l’auto ne serait plus la vache sacrée qu’elle est encore à Montréal.
Car deux visions diamétralement opposées s’affrontent sur la question de la place de l’auto à Montréal. D’une part, Denis Coderre veut toujours plus de « fluidité » pour les autos exactement comme on le réclamait au XXe siècle alors qu’on n’était pas encore conscients de ses innombrables méfaits sur la santé. Et d’autre part Valérie Plante est pour un meilleur partage de la voie publique (et donc une meilleure sécurité) pour TOUS les usagers (piétons, cyclistes, autobus, auto, etc.).
Car réduire la trop grande place prise par l’automobile dans nos rues (qui sont d’abord pour les citadin.es leur milieu de vie, leur environnement premier), c’est bien sûr réduire les émissions toxiques de toutes sortes qu’émettent les voitures et la pollution par le bruit qui est une source de stress constante en ville (donc ça touche les points 5 et 6 de ma liste ci-dessus, le stress).
C’est aussi, en troquant totalement ou partiellement l’auto par du transport actif dont les infrastructures seraient dignes des villes civilisées du XXIe siècle (ce qui n’est malheureusement pas le cas dans ma ville et que l’administration Coderre en place a dangereusement négligé au fil des ans), favoriser l’exercice et ses innombrables bienfaits (le point 2 de ma liste) et les rencontres (point 4), les gens étant alors moins isolés et coupés du monde extérieur que dans des voitures climatisées aux vitres fermées…
Sur cette idée de l’importance du lien social et de l’implication dans la communauté (point 4), de nombreux arrondissement où Projet Montréal est au pouvoir ont favorisé l’implantation de petits marchés publics conviviaux (avec des fruits et légumes frais, donc point 1) et de différents dispositifs d’aménagement urbains (saillies de trottoir qui font office de mini-places publiques, terrasses sur rue pour les restaurants, « placotoires », etc.) qui favorisent ces rencontres à l’échelle humaine si bénéfique pour notre cerveau d’humain.
Et si j’avais à nommer une dernière différence entre « l’équipe Coderre » (qui se résume pas mal au culte de la personnalité de son chef…) et l’équipe de Projet Montréal derrière Valérie Plante en ce qui concerne le dernier point de ma liste (le point 4 sur l’importance des activités intellectuelles stimulantes), je dirais que ce n’est pas en abrutissant les gens avec du divertissement sportif et des festivités clinquantes et coûteuses comme celles entourant le 375e anniversaire de Montréal qu’on stimule la meilleure part du cerveau de ses concitoyen.nes.
C’est plutôt en leur montrant avec transparence (comme l’a fait par exemple Projet Montréal en introduisant la webdiffusion des conseils d’arrondissement) qu’ils peuvent comprendre les enjeux qui les concernent et donc agir sur leur environnement immédiat pour créer de plus en plus « d’affordances » (pour employer un concept de mon cours) qui leur soit agréables. Je pense par exemple au merveilleux projet de ruelles vertes initié par l’administration Projet Montréal du Plateau Mont-Royal qui, encore une fois, en plus de verdir (donc d’améliorer la santé) et de créer un espace plus sécuritaire pour le jeu des enfants, amène les voisins à se mettre les mains dans la terre ensemble, bref à se connaître et à partager leur humanité. Comme notre espèce l’a toujours fait spontanément quand les conditions extérieures lui en donnent l’occasion.
Alors voilà, pour mes concitoyen.nes montréalais nous avons l’occasion le 5 novembre d’infléchir dans le bon sens ces « conditions extérieures » de notre environnement. Donnons-nous cette chance, ne serait-ce que pour une simple question d’hygiène physique et mentale…
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