lundi, 13 janvier 2025
Notre cerveau à tous les niveaux : en librairie et aux Sceptiques du Québec
Quand « Notre cerveau à tous les niveaux » est arrivé en librairie l’automne dernier, on a compris assez vite, mon éditeur et moi, qu’il suscitait quelques interrogations quant à l’endroit où le placer en rayon. Et avec raison, car avec un sous-titre comme « Du Big Bang à la conscience sociale », ça laisse un peu de lousse, comme on dit… Fallait-il le mettre dans les sciences fondamentales ou les sciences sociales ? « Aux deux endroits », avait malicieusement répondu David Murray à des libraires de Québec ! Et il avait raison sur le fond, puisque le livre traite autant des aspects biophysiques qui rendent possible la vie, et donc notre existence, que de l’organisation sociale des humains qui est devenue une menace à ces conditions même d’existence. Voilà pourquoi ça me fait toujours sourire quand je reçois des photos de son placement en libraire. Les deux de cette semaine montrent en tout cas le flair des libraires indépendants qui, dans le premier cas (à Paris en France, merci Josiane Borredon) le voient quelque part entre une monographie de chimie générale et un opus du physicien militant Aurélien Barrau. Et dans le second cas (à Rouyn au Québec, merci Sophie Turri) le placent à côté des essais d’Alain Deneault, Boucar Diouf et Catherine Dorion. Le hasard des patronymes et de l’ordre alphabétique ayant ici bien fait les choses, je vous le concède… 😉
D’ailleurs, pour apprécier ce large spectre de thématiques abordées dans l’ouvrage, je voudrais vous signaler une autre présentation générale que j’en ferai ce jeudi 16 janvier, à 19h (ouverture des portes à 18h30). Il s’agit d’une conférence d’une heure suivie d’une discussion que m’ont invité à faire les Sceptiques du Québec dans le local du Centre humaniste du Québec, au 1225 boulevard St-Joseph Est, à Montréal (voir aussi la page Facebook de l’événement). La présentation sera une version bonifiée de celle du « 2e lancement » du bouquin que j’ai faite dans le cadre de l’UPop Montréal le 20 novembre dernier. Voici le petit résumé pondu pour l’occasion :
Comment évoquer en une heure les 13,8 milliards d’années d’évolution cosmique, chimique et biologique qui ont mené jusqu’à nous ? Parce que c’est ce genre de « Big History » qu’il faut envisager si on veut réellement comprendre qui nous sommes. C’est en tout cas ce que tente de faire mon livre avec son approche évolutive par niveaux d’organisation successifs. Elle permet surtout de comprendre pourquoi notre cerveau et notre corps sont inextricablement liés, et comment l’environnement où il se trouve peut influencer grandement notre pensée. Petite visite guidée de nous-même, donc, où l’on partira de comportements familiers pour faire un « zoom in » jusqu’aux mécanismes les plus intimes de nos synapses qui donnent la plasticité et la variabilité culturelle unique de notre espèce. Pour le meilleur, mais malheureusement aussi parfois pour le pire.
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J’aimerais terminer ce billet en vous parlant d’un grand plaisir retrouvé depuis la parution du livre. Celui de… lire de nouveaux livres ! Les quatre dernières années ne m’ayant pas laissé ce loisir, étant pris dans les mille et une décisions requises par la rédaction de mon propre bouquin et la (re)lecture des classiques qui l’ont inspirée. Je ne mentionnerai que deux de ces nouvelles lectures en cours, que j’évoque aussi dans ma présentation de jeudi. D’abord « Les structures fondamentales des sociétés humaines » (2023), œuvre majeure du sociologue français Bernard Lahire, qui tente de pallier à la difficulté et la frilosité des sciences humaines à discerner les grands principes ou contraintes qui influencent la dynamique particulière des rapports sociaux humains en faisant appel à d’autres disciplines comme la biologie évolutive, l’éthologie (et en particulier la primatologie), l’anthropologie, etc. Et ensuite « The Blind Spot. Why Science Cannot Ignore Human Experience” (2024), où l’astrophysicien Adam Frank, le physicien théorique Marcelo Gleiser et le philosophe Evan Thompson remontent aux sources de l’expérience directe à l’origine de toute connaissance pour critiquer l’approche dominante en science qui consiste à aller vers toujours plus d’abstraction, oubliant ainsi la part la plus fondamentale de notre rapport au monde.
Les personnes qui sont en train de lire Notre cerveau à tous les niveaux (ou qui l’ont fini, oui, oui, il y en a…!) comprendront qu’il s’agit là de questions fondamentales qui sont au cœur de mon approche. Je vous reviendrai d’ailleurs d’ici quelques semaines avec une annonce concernant une « démarche d’approfondissement » (appelons ça comme ça) de mon bouquin, où ces deux livres auront évidemment une bonne place… Donc restez-à l’écoute !
Du simple au complexe | Pas de commentaires
mardi, 27 août 2019
La cognition incarnée enfin devenue « mainstream » !
Le dossier principal du numéro de septembre 2019 de la revue Cerveau & Psycho porte sur la « cognition incarnée ». Cela donne un bon prétexte pour mesurer le chemin parcouru depuis trois décennies au sein de ce qu’on appelle aujourd’hui les «sciences cognitives» et qui incluent les neurosciences, la psychologie, la philosophie, la linguistique, etc. Bref, toutes les disciplines qui s’intéressent de près ou de loin à « l’esprit humain ». Cela fait beaucoup de guillemets en peu de phrases (incluant le titre du billet!), mais c’est symptomatique d’une difficulté que rencontrent depuis toujours ceux et celles qui s’intéressent à l’être humain, à la façon dont il pense et se comporte. Les mots sont en effet les moins pires outils à notre disposition pour penser le monde, mais ils comportent de nombreuses limites et de nombreux pièges. À commencer par la catégorisation dichotomique, la plus célèbre en ce qui nous concerne aujourd’hui étant celle du corps et de l’esprit. (suite…)
De la pensée au langage, Le corps en mouvement | Comments Closed
mardi, 23 avril 2019
Trois critiques à la méditation “pleine conscience”
On entend beaucoup parler de méditation “pleine conscience” (“mindfulness », en anglais) depuis quelques années. C’est en fait devenu l’une des tendances les plus à la mode comme technique anti-stress, répertoriée tant dans lignes directrices des organismes internationaux de santé que dans les bottins locaux de cours et d’ateliers. Sans parler des applications mobiles de nombreuses compagnies qui vous permettent de méditer dans le confort de votre foyer, tout en générant annuellement des dizaines de millions de dollars de revenus pour ces compagnies. On parle même d’un milliard de profits annuels pour l’ensemble de cette industrie !
Je voudrais cette semaine présenter brièvement trois critiques qui ont été adressées à différents aspects de la méditation pleine conscience. (suite…)
L'émergence de la conscience | Comments Closed
mardi, 23 janvier 2018
Deux livres sur l’approche énactive en sciences cognitives
J’ai commencé l’année 2018 sur ce blogue en décrivant certaines expériences bien concrètes qui, tant au niveau du fonctionnement du neurone que du cerveau dans son ensemble, remettait en question des conceptions établies. Mais les sciences cognitives, comme toutes les sciences, ont aussi besoin de s’inscrire dans des cadres théoriques et de définir certains concepts pour être fécondes. Et donc des débats philosophiques émergent forcément à ce moment-là. C’est à ce niveau que l’on se situe dans le billet d’aujourd’hui.
Mais comme je recommence mes activités régulières comme bien des gens cette semaine (dans mon cas des cours à l’UTA comme la session dernière), ce qui me laisse moins de temps pour écrire, je me contenterai de vous signaler la parution de deux ouvrages récents en philo des sciences cognitives. Deux ouvrages que je n’ai pas eu le temps de lire encore, d’où ce billet en guise de «to do list»…
Les deux livres concernent l’approche énactive mise de l’avant à partir du début des années 1990 par des pionniers comme Francisco Varela et Evan Thompson. (suite…)
Le corps en mouvement | Comments Closed
mardi, 21 novembre 2017
La science, comme la philosophie antique, doit se mettre au service de « la vie bonne »
Francisco Varela, William Irwin Thompson et Evan Thompson. Menerbes, Provence, 1997.
Ayant maintenant terminé ma série de billets publiés les mardis sur mes cours à l’Université du troisième âge donnés cet automne, je reprends aujourd’hui mes publications sur divers sujets. Mais je vais dorénavant, pour diverses raisons trop longues à expliquer ici, continuer à les mettre en ligne le mardi (au lieu du traditionnel lundi).
Je voudrais donc dire quelques mots cette semaine sur le rôle social de la science. En particulier sur l’implication politique des scientifiques (et des journalistes scientifiques) sur les enjeux sociaux d’importance. Que peuvent-ils et que doivent-ils dire ? Et quand le dire ? Tout le temps ? Particulièrement lors d’une campagne électorale ? Au point d’appuyer ouvertement un parti et pas un autre ?
Je vous donne mon humble avis là-dessus à la fin de ce billet. Mais d’abord, deux beaux hasards survenus tout récemment et qui éclairent ma position. (suite…)
L'émergence de la conscience, Le corps en mouvement | Comments Closed