mardi, 2 avril 2019
Le cerveau à tous les niveaux archivé et la télésérie « Au coeur du cerveau »
Depuis 2012, Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) a un programme de collecte de sites Web, qui lui permet d’effectuer une copie de site web pour des fins de recherche historique. J’ai été bien content d’apprendre que Le cerveau à tous les niveaux vient d’être archivé dans ce cadre. En fait, le site et le blogue seront vraisemblablement collectés sur une base mensuelle pour rester relativement à jour par rapport aux billets de blogue que je publie chaque semaine.
La copie archivée du Cerveau à tous les niveau est diffusée via une interface libre « Wayback Machine » qui est utilisée par d’autres organismes et bibliothèques nationales qui font de la collecte de site Web. Un exemple d’utilisation de l’application « Wayback » est disponible via le site Web de l’organisme sans but lucratif américain, « Internet Archive » qui procède à des collectes de sites Web dans le monde depuis de nombreuses années.
Je voulais quand même vous donner aujourd’hui un peu de contenu sur le cerveau en vous parlant de la série télé « Au coeur du cerveau » (v.f. de The Brain) animé par le neurologue David Eagleman et produit en Grande-Bretagne en 2015. J’ai donc écouté un épisode au hasard, celui intitulé « Comment décider ? ».
Je dois d’abord préciser que j’ai « décidé » il y a bien une décennie de cela, de jeter mon poste de télé par la fenêtre (façon de parler…). Une journée n’a que 24 heures, il y a la famille, le sport, les ami.es et tellement de bons articles en sciences cognitives que je n’ai pas le temps de lire que ce fut un choix plutôt rationnel et facile. D’autant plus que, comme l’avait candidement déjà avoué le PDG d’une chaîne de télé française, leur rôle se résume pas mal à offrir « du temps de cerveau disponible » à des annonceurs. D’où le contenu essentiellement « divertissant » de la plupart des chaînes télé. La série « Au cœur du cerveau » est un gros cran au-dessus de cela. On y trouve un souci pédagogique de mettre en scène de manière imagée de nombreuses expériences scientifiques souvent classiques que l’on contextualise dans des situations de la vie de tous les jours.
On parle ainsi du test de Stroop sur notre capacité d’inhiber une première réponse qui nous vient spontanément. On présente le dilemme du tramway (ou du trolley) pour montrer l’implication émotive plus forte d’une décision qui implique une interaction corporelle directe avec une autre personne. On montre comment nos réactions émotionnelles inconscientes nous aident quotidiennement à prendre les nombreuses décisions que nous prenons dans une journée devant une multiplicité d’options. Et comment une personne qui a subi une déconnexion entre « raison » et « émotion » en devient incapable.
On fait aussi le lien entre prise de décision et les états physiologiques du corps pour montrer comment le cerveau et le corps forment un tout indissociable, comme je l’écrivais la semaine dernière. L’étonnante histoire de cette étude sur les juges qui accordent plus de libérations conditionnelles le matin après le petit déjeuner et en début d’après-midi après le lunch y est racontée. Comme si le cerveau, et en particulier le cortex frontal, avec moins de glucose dans le sang pour fonctionner en fin d’avant-midi et en fin d’après-midi, comprenait moins bien le plaidoyer des avocats et « ne prenait pas de chance » en décidant de garder les détenu.es en prison…
On y parle aussi de dopamine et de récompense, de plaisir immédiat toujours tentant versus le plaisir différé qui demande plus de volonté. Quitte à se servir de l’importance de nos liens sociaux pour nous aider, comme donner rendez-vous à un.e ami.e au gym pour nous contraindre à y aller.
On présente enfin l’histoire d’une femme dépendante du crack, une drogue nocive et très addictive proche de la cocaïne et d’une technique de biofeedback sophistiquée impliquant un scan d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle pour l’aider à résister à ses envies de rechute.
En trois quart d’heure, une personne qui ne lit pas régulièrement ce blogue par exemple (!) découvre donc une foule de phénomènes fascinants sur de nombreux aspects des bases cérébrales de la prise de décision au sens très large du terme. Mais ce genre de série a bien entendu les qualités de ses défauts, comme on dit. Les différents phénomènes présentés auraient très bien pu se retrouver sous d’autres thématiques et il y a très peu de perspective évolutive pour aborder un tant soit peu la question toujours difficile du « pourquoi » nous avons aujourd’hui ces prédispositions (à la recherche de récompenses rapides, aux addictions, aux liens sociaux, etc.).
Et bien sûr aussi, on ne va pas jusqu’à questionner les causes environnementales et structurelles qui amènent des gens à vouloir tellement fuir leur réalité que la prise de drogue immodérée devient la moins pire des solutions. Pourtant l’on sait bien aujourd’hui que l’opposé de la dépendance, ce n’est pas tant la sobriété, mais la connexion avec les autres. Et l’on sait que les multinationales nuisent plus souvent à notre santé qu’elles ne nous procurent du bien-être.
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