lundi, 16 janvier 2012
Voir avec sa langue, un cas de substitution sensorielle
On ne compte plus les exemples spectaculaires de plasticité cérébrale, cette capacité de notre cerveau de se réorganiser constamment. Non seulement pour apprendre, en modifiant l’efficacité de ses connexions synaptiques, mais également pour réattribuer de vastes zones du cortex cérébral à d’autres fonctions à la suite d’un accident cérébrovasculaire ou d’une privation sensorielle.
Dans le cas des aveugles de naissance par exemple, on sait depuis le milieu des années 1990 qu’avec l’entraînement à la lecture du braille, le cortex visuel théoriquement non sollicité par des stimuli tactiles, s’active de plus en plus. On parle de « substitution sensorielle » pour décrire ce phénomène surprenant où une partie du cerveau laissé pour ainsi dire en jachère, prend en charge une modalité sensorielle qui n’est pas officiellementla sienne. Et dans le cas des aveugles, c’est le lobe occipital, la partie arrière de notre cerveau où se trouvent les aires visuelles.
Substitution sensorielle chez le non-voyant et plasticité cérébrale
L’activité du cerveau lors de la lecture en braille
Le concept de substitution sensorielle remonte aux travaux pionniers de Paul Bach-y-Rita qui a introduit cette idée dans les années 1960, à une époque où l’on ne pensait jamais que la plasticité cérébrale pouvait avoir une telle importance.
Plusieurs scientifiques continuent aujourd’hui d’explorer les possibilités de substitution sensorielle dans le cerveau afin d’aider les gens dépourvus d’une modalité sensorielle à la retrouver en partie. C’est le cas du Dr. Maurice Ptito et de son équipe à l’Université de Montréal qui ont développé un dispositif de substitution visuelle basé sur la stimulation tactile de la langue.
Laboratoire de Recherche du Dr. Maurice Ptito
Des vidéos sur son site web nous font littéralement « voir » ce qu’un aveugle de naissance perçoit tactilement sur sa langue et lui permet, après entraînement, d’éviter des obstacles dans un couloir. L’un de ces vidéos est d’ailleurs un extrait de l’excellent film « La dynamique du cerveau » centré sur cette idée que le cerveau est tout sauf quelque chose de statique ou de rigide. Et ce, même chez l’adulte.
Vidéo : Extrait de La dynamique du cerveau
Vidéo : Un oeil sur la langue – Émission Découverte
Enfin, une autre idée qui fait son chemin et qui est reliée à ce type d’expériences est la théorie sensorimotrice de la perception proposée par le psychologue Kevin O’Regan et le philosophe Alva Noé permettant d’expliquer le rôle essentiel de la motricité dansla perception. On constate par exemple que c’est en bougeant constamment la tête qui porte la caméra que les personnes aveugles parviennent à percevoir les obstacles à l’aide des stimulations tactiles sur la langue. Comme quoi cette conception “dynamique” du cerveau semble véritablement être la norme plutôt que l’exception, et ce, peu importe l’échelle considérée.
A sensorimotor account of vision and visual consciousness
Au coeur de la mémoire, Les détecteurs sensoriels | 6 commentaires »
On me signale un autre phénomène de substitution sensorielle remarquable : l’écholocation humaine, c’est-à-dire la capacité qu’ont certaines personnes aveugles de percevoir l’écho de petits clics qu’elles font avec leur langue et de s’en servir pour s’orienter dans l’espace, percevoir la présence d’objets, etc.
Human echolocation
http://en.wikipedia.org/wiki/Human_echolocation
Sur Daniel Kish :
Is It Possible?- Real Life Batman
http://www.youtube.com/watch?v=vpxEmD0gu0Q
Blind man uses his ears to see
http://www.cnn.com/2011/11/09/tech/innovation/daniel-kish-poptech-echolocation/
Sur Ben Underwood:
The boy who sees without eyes [1/5]
http://www.youtube.com/watch?v=qLziFMF4DHA
Et l’une des premières expériences d’imagerie cérébrale avec de telles personnes (mai 2011):
Neural Correlates of Natural Human Echolocation in Early and Late Blind Echolocation Experts
http://www.plosone.org/article/info%3Adoi%2F10.1371%2Fjournal.pone.0020162
En résumé, l’article conclue que le traitement de l’écho des clics recrute des régions cérébrales typiquement associées à la vision plutôt qu’à l’audition.
[…] Voir avec sa langue, un cas de substitution sensorielle […]
[…] C’est à la suite de rencontres fortuites avec des gens intéressés par la cybernétique et l’informatique qu’il a contribué à mettre au point d’un dispositif permettant de transformer les différentes couleurs du spectre visible en des sons de fréquence spécifique. Et comme Harbisson vit depuis une dizaine d’années maintenant avec cette « prothèse », son cerveau a complètement associé les fréquences en question avec les noms des différentes couleurs. De sorte qu’il dit percevoir maintenant directement les couleurs sous forme sonore. Un cas spectaculaire de ce que les scientifiques appellent la substitution sensorielle. […]
[…] C’est à la suite de rencontres fortuites avec des gens intéressés par la cybernétique et l’informatique qu’il a contribué à mettre au point d’un dispositif permettant de transformer les différentes couleurs du spectre visible en des sons de fréquence spécifique. Et comme Harbisson vit depuis une dizaine d’années maintenant avec cette « prothèse », son cerveau a complètement associé les fréquences en question avec les noms des différentes couleurs. De sorte qu’il dit percevoir maintenant directement les couleurs sous forme sonore. Un cas spectaculaire de ce que les scientifiques appellent la substitution sensorielle. […]
[…] C’est à la suite de rencontres fortuites avec des gens intéressés par la cybernétique et l’informatique qu’il a contribué à mettre au point d’un dispositif permettant de transformer les différentes couleurs du spectre visible en des sons de fréquence spécifique. Et comme Harbisson vit depuis une dizaine d’années maintenant avec cette « prothèse », son cerveau a complètement associé les fréquences en question avec les noms des différentes couleurs. De sorte qu’il dit percevoir maintenant directement les couleurs sous forme sonore. Un cas spectaculaire de ce que les scientifiques appellent la substitution sensorielle. […]
et on fait comment pour participer à ces recherches ?