mardi, 12 juillet 2011
Parler sans aire de Broca
Depuis les observations de Paul Broca dans les années 1860, on sait que le cortex frontal inférieur gauche, aussi appelé « aire de Broca », est fortement impliqué dans nos capacités langagières. D’abord associé à la seule production du langage, son rôle s’est progressivement complexifié. De sorte que les données récentes de l’imagerie cérébrale rendent plutôt caduque la dichotomie initiale d’aire de production et d’aire de compréhension du langage.
Cette vision simpliste est de plus en plus remplacée par une conception plus dynamique du cerveau qui reconnaît des régions spécialisées, mais où les réseaux de neurones sont plus flexibles et peuvent être recrutés selon les exigences de la tâche.
Des études cliniques comme celle réalisée en 2009 par Monique Plaza et son équipe sur le patient « FV » vont par exemple en ce sens. Ce dernier a subi une ablation de tumeur cérébrale qui s’était développée dans une relativement grande région de son hémisphère gauche, incluant son aire de Broca.
La chercheuse a donc évalué ses capacités langagières avant, durant et après l’opération avec des tests standards et d’autres plus précis. Suite aux déficits habituels observés après la chirurgie, FV regagna la plupart de ses fonctions langagières, phénomène difficilement explicable sur la base d’une approche localisationniste traditionnelle. Mais comme la tumeur s’était développée lentement, les chercheurs croient que des régions adjacentes à l’aire de Broca de FV (comme le cortex prémoteur et la tête du noyau caudé) ont eu le temps de prendre en charge les fonctions détruites au fur et à mesure.
Bien que certains tests aient mis en évidence quelques déficits subtils chez FV (comme l’incapacité de parler du discours d’une autre personne) qui révèlent des failles dans cette plasticité compensatoire, ces résultats confirment tout de même la pertinence d’une conception connexionniste plus dynamique et moins figée du cerveau.
Speaking without Broca’s area
Speaking without Broca’s area after tumor resection
Contrasting acute and slow-growing lesions: a new door to brain plasticity
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