lundi, 10 février 2020
La suite du cours Notre cerveau à tous les niveaux
« Le long sentier vers l’humanisation de l’humanité est éclairé par trois luminaires: le désir de comprendre le monde (la science), de l’embellir (l’art) et d’aider les êtres vivants à vivre (l’empathie). »
– Hubert Reeves, Le banc du temps qui passe, p.145
Nous sommes « de la poussière d’étoile », comme le dit aussi Hubert Reeves. Mais de la poussière d’étoile méchamment bien organisée ! Une (auto)organisation qui défie, l’espace de quelques décennies, la tendance thermodynamique naturelle vers la désorganisation, l’entropie. Mais dans ce bref et fragile intervalle de temps qu’on appelle la vie, l’être humain a le temps de se poser quelques questions sur ce qu’il fait sur cette planète. Je reprends cette semaine une démarche commencée cet automne, et qui va en ce sens : le cours Notre cerveau à tous les niveaux, donné en collaboration avec l’UPop Montréal.
Il s’agit de la suite de cette série de 10 séances dont 5 ont été données cet automne au café Les Oubliettes. Comme je l’expliquais dans ce billet présentant la démarche générale du cours, celui-ci part d’une question toute simple mais fondamentale : que peut-on connaître ? Et très vite nous nous étions rendu compte que cette question est indissociable du type de système nerveux qui se la pose. Nous avions donc entrepris de retracer quelques jalons historiques ayant permis de comprendre un peu mieux la grammaire de base de notre système nerveux. De là, nous étions partis de phénomènes fondamentaux pour la survie (maintien de l’équilibre du milieu intérieur, sensation plaisante ou douloureuse, apprentissage et mémoire de nos bons et mauvais coups, etc.), et nous avions présenté des circuits cérébraux de millions de neurones impliqués dans ces comportements. Et puis nous avions étendu notre exploration à l’ensemble du cerveau, découvrant différentes sortes de cartes qu’il est possible de dresser, grâce entre autres à l’imagerie cérébrale, des réseaux à grande échelle qui s’y déploient.
Tous les pdf de ces présentations ainsi que le vidéo du « Facebook Live » de chaque soirée sont accessibles ici. Quelle sera la suite de cette aventure où chaque séance « en rajoute une couche » en terme de complexité ? Je vous en donne un aperçu dans les quelques lignes qui suivent…
La prochaine et 6e séance de la série, celle du mercredi 19 février, permettra de comprendre que de ces réseaux cérébraux de milliards de neurones interconnectés émerge une activité électrique rythmique. Loin d’être un simple bruit de fond comme on l’a cru jadis, nous verrons que ces oscillations et synchronisations d’activité influencent nombre de nos fonctions cognitives. Et nous seront forcés de constater que cette activité endogène constante de notre cerveau en fait un organe toujours proactif et jamais passif.
Cette nature projective de la majorité de notre activité cérébrale inverse carrément les conceptions générales ayant eut cours jusqu’à la fin du XXe siècle environ. Et l’on verra lors de la 7e séance du 4 mars que notre cerveau est beaucoup moins un agrégateur d’inputs sensoriels en provenance du monde extérieur qu’une machine qui simule constamment le monde, qui fait des prédictions sur ce qui s’y trouve pour décider quoi faire : porter attention à certaines choses et pas à d’autres, prendre une foule de petites décisions rapides et inconscientes au quotidien, inhiber quand il le faut certains comportements automatiques au profit d’autres plus réfléchis, etc.
Lors de la 8e séance du 18 mars, on élargira encore un peu plus notre perspective en réalisant que cerveau et corps ne font qu’un et sont constamment affectés par l’environnement. Il est par exemple très difficile de distinguer cognition et émotion, parce que la première s’enracine dans la seconde, qui elle-même s’enracine dans le corps tout entier. Si tous les grands systèmes du corps humain communiquent entre eux, nos simulations mentales peuvent avoir un effet direct bien concret sur notre corps et notre santé, ce que l’exemple du stress et de l’effet placebo nous permettra de mieux comprendre.
La 9e séance, celle du 1er avril, nous permettra de comprendre à quel point notre cerveau… nous joue des tours ! Dans le sens où ce qui motive réellement nos comportements nous est la plupart du temps inaccessible consciemment. Et que nos facultés langagières sont surtout là pour justifier a posteriori des actes dont l’origine nous échappe parce que la somme inconsciente de toutes nos expériences de vie enfouies dans nos assemblées de neurones. Cela nous amènera à examiner le plus grand tour de passe-passe dont est capable notre cerveau : nous donner l’impression qu’il y a un « Je » immuable qui décide librement de nos actions…
Nous conclurons le 15 avril avec une 10e séance où nous poserons la question de la morale de cette longue histoire de l’évolution ayant mené jusqu’à nous. Et nous nous demanderons si notre espèce, pouvant être à la fois plus agressives que le chimpanzé et plus altruistes que le bonobo (nos deux plus proches cousins), a de l’avenir. Cela est loin d’être évident considérant toutes les indices montrant à quel point le système économique actuel est néfaste notre santé physique et mentale. Le pari d’une (bio)pédagogie qui prenne le parti du monde vivant tout entier devient dès lors nécessaire, où toute décision devrait être prise en fonction de l’espèce entière incluant la biosphère. Et non d’un de sous-groupes humains aux intérêts particuliers comme c’est malheureusement le cas trop souvent.
Et pour prendre ces décisions éclairées au profit de tout le vivant, il faut des données empiriques, des connaissances. Mais qu’est-ce que connaître ? Je connais une bonne série de cours qui commence par cette question. Je vous en ai déjà parlé ? 😉
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